Exonération sur les droits de succession ? On vous explique tout !
Les chiffres clés sur l’héritage en France
- Oui, la France se place sur la 3ème place du podium mondial en matière d’imposition de l’héritage. Avec un taux marginal de taxation de 45 % (jusqu’à 60 % pour des parents éloignés), elle se situe juste derrière le Japon (55 %) et la Corée (50 %).
- Oui, notre pays concède, par ailleurs, un des systèmes d’exonérations en ligne directe les plus faibles du monde : 100 000 € tous les 15 ans en ligne directe contre 1 million d’€ en Italie et désormais 11,2 millions de dollars aux États‑Unis.
- et encore Oui, l’Hexagone fait partie d’un groupe très restreint de quatre pays (avec la Corée, la Belgique et le Japon) dont les impôts sur les successions et les donations représentent plus de 1% du total des recettes fiscales.
Néanmoins, force est de constater que nos compatriotes ont tendance à surestimer leurs capacités d’épargne et donc de transmission car, dans les faits, seuls 20 % des héritages sont taxés. En outre, de multiples solutions existent pour alléger considérablement le poids de cette fiscalité ; elles gravitent toutes autour d’un seul mot-clé : l’An-ti-ci-pa-tion !
Une fois ce principe intégré, il suffit de pénétrer l’univers parfois obscur et nébuleux de la transmission patrimoniale. Comment fonctionne-t-il ? Comment préparer sa succession et donc l’optimiser ? Quelles sont les bonnes dispositions à prendre ? Comment être en mesure de conseiller ses proches, le cas échéant ? Toutes les réponses, à suivre…et également dans notre guide sur les droits de succession
Le démembrement de propriété : usufruit et nue propriété
Il faut savoir que tout bien immobilier se décompose juridiquement en 2 « entités » : d’une part, la nue-propriété (c’est-à-dire le droit de disposer de ce bien, de le vendre) et d’autre part, l’usufruit (c’est-à-dire le droit d’utiliser ce bien voire de le louer).
Tout l’intérêt de l’opération réside dans le fait que :
- seule la valeur de la nue-propriété est taxable, en fonction de l’âge du donateur (usufruitier). Plus il est jeune, plus la valeur taxable est faible (cf tableau ci-dessous) et la donation intéressante (d’où la nécessité d’anticiper),
- l’opération permet de figer la valeur des biens (intéressant si le bien s’apprécie dans le temps).
Exemple : Mr Dupont, célibataire de 60 ans avec un enfant détient un bien immobilier évalué 350 000 €. S’il décide aujourd’hui, de donner son bien immobilier à son fils en nue-propriété, tout en en gardant la jouissance (le droit de l’habiter à titre gratuit), la valeur taxable de la nue-propriété de sa maison sera de : 350 000 € x 50 % = 175 000 €. Compte tenu de l’abattement de 100 000 € par enfant, l’assiette taxable de son bien sera de 75 000 € seulement. Le montant des droits de donation s’élèvera à 75 000 € x 20 % environ = 15 000 € environ. À son décès, son fils récupérera l’usufruit du bien, sans taxes supplémentaires et en sera pleinement propriétaire.
Sans l’opération de démembrement, le fils de M. Dupont aurait payé au minimum : 350 000 € (valeur de la maison qui aurait pu cependant augmenter entre les 60 ans de Mr Dupont et son décès) – 100 000 € d’abattement = 250 000 € x 20 % environ de droits de succession : 50 000 €. En démembrant, Mr Dupont. a donc accru de 35 000 € au minimum, l’héritage qu’il laissera à son fils, tout en conservant la jouissance de son bien.
La donation : partager de son vivant pour optimiser sa fiscalité
Néanmoins, afin de faciliter l’aide intergénérationnelle, l’État a mis en place un système d’abattements sur les biens transmis par donations. Ce dernier est déterminé par le lien de parenté entre le donateur et le bénéficiaire. Les donations sont donc exonérées de tous droits à hauteur du montant des abattements, tous les 15 ans. Elles doivent être déclarées à l’Administration fiscale.
Lien de parenté | Abattements |
Ligne directe (enfants vivants ou ascendants) | 100 000 € |
Petit-enfant | 38 865 € |
Arrière-petit-enfant | 5 310 € |
Conjoint ou partenaire de PCS | 80 724 € |
Frère/soeur | 15 932 € |
Neveu/nièce | 7 967 € |
Personne handicapée | 159 325 € |
Tableau comparatif des abattements selon son lien de parenté
En plus de ces abattements, s’ajoute une exonération tous les 15 ans de dons familiaux de sommes d’argent, à hauteur de 31 865 € pour chacun des enfants, petits-enfants et neveux et nièces. Le donateur doit avoir moins de 80 ans et le bénéficiaire doit être majeur.
Exemple : pour un couple, il est théoriquement possible de transmettre : 2 x 100 000 € + 2 X 31 865 € en 2022 et la même chose 15 ans plus tard en 2037 soit 547 000 € à chacun de ses enfants en 15 ans, en toute franchise d’impôts.
Outre les donations, il est également possible de recourir aux présents d’usage, qui ne sont pas considérés comme des donations. Il s’agit de cadeaux de valeur (argent, bijoux, objets d’art etc.) donnés pour des occasions particulières (anniversaire, noël, diplôme, mariage, etc.). Ils ne font l’objet d’aucune déclaration ni taxes mais doivent être proportionnels au patrimoine du donateur.
La donation au dernier vivant (qui ne concerne que les couples mariés) fonctionne comme un testament. Sans elle, le conjoint survivant (en présence d’enfants) doit choisir entre ¼ du patrimoine en pleine propriété ou ¾ en usufruit. Son objectif est donc de privilégier le conjoint en lui offrant la possibilité de choisir parmi 2 autres options :
- 100 % en usufruit pour le conjoint et 100 % en nue-propriété pour les enfants
- 1/4 en pleine propriété (PP) + 3/4 en usufruit pour le conjoint (au lieu de 1/4 en pleine propriété seulement sans donation au dernier vivant)
La donation-partage permet, quant à elle, de répartir à l’avance tout ou partie des biens entre tous les enfants. C’est un partage anticipé de la succession. Les biens donnés et partagés ne seront pas rapportés à la succession, quelle que soit l’évolution de leur valeur.
Le contrat d’assurance-vie : outil de transmission du patrimoine
L’assurance-vie est un contrat par lequel l’assureur s’engage, en contrepartie du paiement de primes, à verser une rente ou un capital à l’assuré ou à ses bénéficiaires. Elle bénéficie d’une fiscalité avantageuse et offre une grande liberté dans le choix des bénéficiaires.
Il existe 2 types de contrats :
- les contrats « monosupport » en euros : les versements sont investis sur des produits sans risque, telles que des obligations d’État, et revalorisés chaque année. Le capital investi est garanti à tout moment et les intérêts de l’année sont définitivement acquis,
- les contrats « multisupport » : les versements sont réalisés sur des produits sans risque mais aussi sur des produits liés à la bourse (actions, obligations) investis sur les marchés financiers, appelés unités de compte (UC). L’assureur garantit non pas la valeur de ces unités, qui fluctue, mais leur nombre. Cet investissement est plus risqué que les fonds en euros mais peut aussi se révéler plus rémunérateur.
Pour en savoir plus : L’assurance-vie : produit financier préféré des Français
Si l’assurance-vie permet de se constituer un capital sur le long terme et éventuellement de compléter ses revenus, c’est également un formidable outil de transmission du patrimoine.
En effet, les sommes versées avant 70 ans bénéficient d’un abattement global (sur l’ensemble des assurances-vie détenues) de 152 500 € par bénéficiaire. Il est donc possible de transmettre cette somme en franchise d’impôt. Un taux forfaitaire de 20% par bénéficiaire sera appliqué entre 152 500€ et 852 500€ (porté à 31,25% au-delà).
En revanche, les sommes versées après 70 ans, ne bénéficient que d’un abattement global de 30 500 € pour l’ensemble des bénéficiaires, ce qui est nettement moins avantageux. Tout l’enjeu est donc d’effectuer les versements avant 70 ans.
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Créer une SCI : Profiter d’un abattement sur la succession
La SCI peut s’avérer une solution très intéressante pour transmettre du patrimoine, tout en allégeant la charge fiscale des héritiers.
Pour mémoire, la SCI permet de posséder et de gérer un patrimoine immobilier à plusieurs (minimum 2 associés). Le bien immobilier est divisé en parts sociales entre les associés, qui peuvent les transmettre indépendamment à la ou les personne(s) de leur choix.
Dans le cadre d’une SCI, la transmission de ses parts aux enfants permet de profiter de l’abattement de 100.000€ tous les 15 ans. Lorsque le bien a une valeur supérieure à 100 000€, la donation peut être effectuée par tranches, chaque fois sur une valeur maximum de 100 000€, jusqu’à transmission totale des parts de la SCI.
Autre avantage intéressant de la SCI : les parts sociales peuvent bénéficier d’une décote (généralement 15 %) de leur valeur avant calcul des droits de succession car il s’agit d’un actif réputé moins liquide qu’un bien immobilier classique.
Pour en savoir plus sur ce sujet : Qu’est ce qu’une SCI ?
3 outils plus « anecdotiques » viennent compléter l’éventail des options envisageables pour réduire les droits de succession :
- l’investissement dans une parcelle de bois/forêt ou des biens ruraux : seulement 25 % de la valeur à la parcelle est soumise aux droits de succession. En termes de succession, 75 % de la valeur de la forêt sera exonérée
- la souscription d’une assurance-décès : Lorsqu’on a peu de patrimoine et que l’on est encore jeune, l’assurance-décès peut être un bon moyen de garantir l’avenir de ses proches, notamment celui de ses jeunes enfants. Contre le versement de cotisations, l’assureur s’engage, si le décès intervient durant la période couverte (10 ans, 20 ans, etc.), à leur verser un certain capital (exemple : 100 000 €). L’argent sera alors perçu sans impôts ni droits de succession
- la réalisation d’un legs universel avec charge, auprès d’une fondation. Depuis le 1er janvier 2019, les donations faites aux fondations ou associations reconnues d’utilité publique (FRUP) sont exonérées de droits de succession. Il est même possible de désigner un tel établissement comme légataire universel, à charge pour lui de transmettre une partie de la donation nette de droits et frais à un légataire (héritier) désigné.
Comparatif des différents outils pour optimiser sa succession
Avantages | Inconvénients | |
Démembrement | Solution souple qui permet de ne pas se démunir. Permet de réaliser une belle économie d’impôts au moment du décès. | Ne permet pas d’aider financièrement les proches dans leurs projets d’investissement. Les donateurs ne sont pas libres de vendre leur bien comme bon leur semble. Ils devront recueillir l’accord de leurs enfants devenus nus-propriétaires. Solution, qui a un coût (1500 € minimum de frais de notaire) pour les donateurs. Il faut disposer des liquidités nécessaires au paiement des droits, même réduits au moment du démembrement. |
Donation / don familial Présent d’usage | Donne droit à une exonération d’impôts selon les barèmes en vigueur. Permet de donner un coup de pouce à ses proches au moment où ils en ont le plus besoin. Facile, souple, libre, neutre fiscalement. Idéal si pas d’héritiers en ligne directe. | Acte définitif. Les donateurs perdent immédiatement tout recours sur les biens donnés. Destiné essentiellement aux familles aisées qui disposent de liquidités. Doit être en rapport avec les revenus et le patrimoine du donateur. |
Assurance-vie | Excellent outil en termes de réduction des droits de succession. | Pour un avantage optimal, les versements doivent être impérativement effectués avant l’âge de 70 ans par le donateur. |
Création d’une SCI immobilière | Évite l’indivision. Permet de mieux transmettre ses biens immobiliers, en profitant de l’abattement de 100 000 € tous les 15 ans. | En cas de location du bien, ne permet pas de bénéficier du régime du loueur en meublé non professionnel (LMNP). |
Investissement dans une parcelle de forêt | Avantage fiscal substantiel sur la transmission. | Rendement correct (1,5 à 2 % l’an) mais moindre que sur d’autres supports de placement. |
Assurance-décès | Idéale lorsque l’on a peu de patrimoine et de jeunes enfants. Primes très raisonnables tant que l’on ne dépasse pas les 50/55 ans (10 à 15 € par mois environ pour 100 000 € de capital garanti). | Radiation de la compagnie d’assurance au-delà de 75 – 80 ans. Les primes augmentent vite après 50 ans. |
Legs à une fondation | Envisageable surtout en l’absence d’héritiers de 1er degré. Permet de soutenir des causes qui tiennent à coeur tout en favorisant un donataire. | Difficulté à évaluer et contrôler la capacité de l’organisme à utiliser/gérer sainement les fonds transmis et à vendre les actifs de patrimoine dans les meilleures conditions possible. |
Tableau comparatif des avantages et inconvénients des principales solutions pour alléger la fiscalité sur l’héritage
Mise en situation : exemple d’exonération
Il est donc potentiellement réalisable de transmettre plusieurs centaines de milliers d’euros sans payer 1 € de droits de succession. Trois conditions toutefois s’imposent : s’y prendre tôt (dès 50 ans), disposer de biens et autres liquidités à donner et avoir des héritiers en ligne directe. Démonstration.
Hypothèses de notre exemple : Homme célibataire, 2 enfants Bien immobilier 500 000 € – Âge du décès : 85 ans | Montant des économies de droits de succession |
Entre 50 et 61 ans | |
Démembrement Droits de mutation : 500 k€ x 50 % – 200 k€ abattement x 20 % = 10 k€ | 490 000€ |
Don familial à 49 ans | 31 865 € par enfant = 63 730 € |
Donation à 50 ans | 100 000 € par enfant = 200 000€ |
Dons d’usage : 1500 € par enfant et par an | 33 000 € |
Entre 61 et 70 ans | |
Don familial à 64 ans | 31 865 € par enfant = 63 730 € |
Donation à 65 ans | 100 000€ par enfant = 200 00à € |
Dons d’usage : 1500 € par enfant et par an | 27 000 € |
Versements sur assurance-vie 152 500 € par enfant | 305 000 € |
Entre 70 et 85 ans | |
Don familial à 79 ans | 31 865 € par enfant = 63 730 € |
Donation à 80 ans | 100 000 € par enfant = 200 000 € |
Dons d’usage : 1500 € par enfant et par an | 45 000 € |
Versement assurance-vie après 70 ans abattement unique 30 500 € | 30 500 € |
Abattement au décès | 200 000 € |
Économie totale réalisée (Transmission en franchise d’impôt) | 1 921 690 € |
Exemple de calcul d’exonération de droits de succession
La synthèse de la rédaction
Si elle apparaît facialement relativement élevée, la fiscalité sur la transmission de patrimoine regorge de solutions pour réduire substantiellement les droits de succession. En outre, elle touche une part relativement limitée de la population française.
Cher à tous les Français, le thème de la transmission patrimoniale s’est invité dans la campagne présidentielle de 2022, chaque candidat envisageant de la réformer. Les uns préconisant un ajustement à la baisse des droits de transmission en ligne indirecte, jugés confiscatoires (55 à 60 %). Les autres privilégiant, au contraire, une hausse de 25 % des prélèvements sur les donations et héritages. Proposition pour l’instant rejetée par le gouvernement. En effet, une telle hausse serait-elle un bon signal envoyé aux créateurs de richesse ? surtout au sein d’un espace européen affichant un traitement de l’héritage très hétérogène…
Une autre piste pourrait consister à alléger la fiscalité sur les donations en raccourcissant le délai entre 2 opérations. Porté à 6 ans sous le quinquennat de Nicolas Sarkosy, il est repassé, depuis, à 15 ans. Cette solution permettrait manifestement de soutenir financièrement les jeunes ménages, qui en ont besoin pour investir et ferait circuler dans l’économie, l’épargne de ceux, qui ne l’utilisent pas ou peu. Créant ainsi un cercle vertueux, elle favoriserait croissance et emplois et, par effet d’entraînement, tendrait à booster les recettes de l’Etat…sans augmenter les impôts…
Rendez-vous le 24 avril 2022 pour savoir quelle tendance l’emportera !
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