Investir en temps de guerre : les leçons du conflit russo-ukrainien

Le 24 février, les troupes de la Fédération de Russie pénètre sur le territoire ukrainien. Et plutôt que d'envoyer des troupes participer aux combats qui secouent l'Ukraine, ses alliés européens et les États-Unis déclarent à leur tour une véritable guerre économique à la Russie. Quel sera l'impact de ces sanctions ? Quels secteurs seront les plus écorchés par le conflit ? Quels seront ceux qui pourraient au contraire profiter de la situation ?
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Le 24 février, les troupes de la Fédération de Russie pénètrent sur le territoire ukrainien. Et plutôt que d’envoyer des troupes participer aux combats qui secouent l’Ukraine, ses alliés européens et les États-Unis déclarent à leur tour une véritable guerre économique à la Russie. Quel sera l’impact de ces sanctions ? Quels secteurs seront les plus écorchés par le conflit ? Quels seront ceux qui pourraient au contraire profiter de la situation ? On fait le point.

L’impact de la guerre sur les marchés financiers

Comme on pouvait s’y attendre, les marchés financiers ont été lourdement bouleversés par l’invasion, notamment en Europe. Le jeudi 24 février fût en effet bien sombre pour des indices comme le CAC40 qui baissait de 3,8%. Et il ne s’agissait pas que d’un soubresaut ponctuel : rapporté à l’ensemble du mois de février, l’indice roi de l’économie française a perdu 4,86%. Évidemment, la Bourse de Moscou fut encore plus touchée, comme en témoigne une spectaculaire chute de 40% en un jour ! Désormais, elle est tout bonnement fermée, et ce jusqu’à nouvel ordre… Autre indicateur saisissant, la valeur du rouble n’en finit plus de s’effondrer puisqu’un euro vaut désormais près de 125 roubles, contre environ 93 roubles avant le début du conflit.

Côté américain, le Nasdaq avait plutôt bien relevé la tête le jour de l’invasion, mais la possibilité d’un conflit de longue durée inquiète. Dans le rouge au moment de l’ouverture du 24 février, l’indice avait finalement progressé de 3,4% en fin de séance. La dynamique s’est ensuite répandue à l’ensemble du pays. Le Dow Jones et le S&P 500 également sont en légère progression sur la semaine écoulée, malgré une nette chute le 1er mars qui a fait très peur aux boursicoteurs. Il faut dire qu’en temps de guerre, la notion de stabilité est très relative.

En retenant l’aide militaire pour se concentrer sur une contre-offensive économique, les états d’Europe et d’Amérique ont en effet légèrement rassuré le marché. Gel des avoirs d’oligarques, isolement des banques impliquées dans le financement du Donbass, suspension du projet de gazoduc Nord Stream 2, l’exclusion des banques russes de la plateforme interbancaire SWIFT, isolation de la banque centrale russe des marchés inter-capitaux… L’Europe et les États-Unis ont multiplié les sanctions pour frapper la Russie au portefeuille.

Toutefois, les conséquences de la riposte économique et de la guerre ne se borneront pas à l’Ukraine et la Russie. Au contraire, les consommateurs comme les investisseurs du reste de l’Europe vont eux aussi devoir s’adapter.

La Bourse de Moscou fermée, conséquence de l’isolation économique russe – Source : Reuters

Les secteurs affaiblis

L’industrie alimentaire en plein stress

De nombreux pays d’Europe sont largement dépendants du blé produit en Russie et en Ukraine. Deux pays désormais en guerre qui représentent plus d’un quart des exportations mondiales ! Idem pour les exportations d’huile de tournesol, dont la moitié est assurée par l’Ukraine seule. Il est pratiquement admis que la production de ces trois denrées indispensables à l’industrie de l’agro-alimentaire sera perturbée par la guerre russo-ukrainienne, et que les exportations soient bloquées pour des durées impossibles à déterminer.

Pour les agriculteurs, un approvisionnement perturbé se traduira immanquablement par une flambée des prix, ce qui réduira leur marge. Pour les consommateurs, ces pénuries augmenteront également les prix d’un grand nombres de denrées. Pire, cela concerne principalement des produits jusqu’ici bon marché. Les céréales, évidemment, mais aussi les pâtes ou encore la farine seront ainsi les premiers produits impactés. Ces hausses devraient alors se répercuter sur le bétail, nourri au céréales, pour que le prix de la viande augmente à son tour. Bref, alors que le niveau d’inflation ne cesse d’augmenter chaque mois depuis novembre 2021, la tendance n’est pas prête de s’inverser.

Malheureusement, le secteur agro-alimentaire ne sera pas le seul touché. C’est même l’ensemble de la production industrielle d’Europe qui devrait devenir plus onéreuse.

L’énergie, un secteur déjà en crise, souffrira particulièrement de la guerre

En effet, des troubles en Russie signifient également des perturbations énergétiques. En effet, l’autre exportation majeure de la Russie, c’est le gaz, dont dépendent plusieurs pays d’Europe. On pense notamment à l’Allemagne, qui avait fondé de grands espoirs sur le projet Nord Stream 2 désormais à l’arrêt, mais nos voisins germaniques sont loin d’être un cas isolé. En fait, c’est près de 40% du gaz naturel d’Europe qui nous provient des terres de Vladimir Poutine.

Et en plus du gaz, la Russie est également un grand exportateur de pétrole. La Fédération est d’ailleurs responsable de près de 25% de la consommation européenne. Forcément, un tel bouleversement du mix énergétique répartis à travers toute l’Europe aura nécessairement des conséquences néfastes. Et généralisées ! Lorsque l’énergie est plus rare, c’est la production industrielle dans sa globalité qui devient plus coûteuse. Dans ce cas de figure, l’inflation ne fait qu’augmenter, alors que la production baisse… On entre ainsi dans un cercle vicieux dont il est extrêmement difficile de sortir.

Une perspective alarmante qui n’est pas sans rappeler la crise pétrolière qu’avait engendré la guerre du Yom Kippur en 1973. Et encore, à l’époque, l’économie était bien moins globalisée qu’aujourd’hui.

Le gaz russe indispensable au mix énergétique européen – Source : Statista

Les secteurs prometteurs en temps de guerre

Les actions des secteurs de l’armement et de l’aéronautique vont décoller

Qui dit conflit, dit course à l’armement. Ce sera notamment le cas des pays d’Europe tels que la France, bien conscients que la possibilité d’une guerre s’étendant à tout le continent ne sera peut-être plus l’exclusivité des livres d’histoire… En conséquence, les investisseurs peuvent raisonnablement s’attendre à une hausse du budget alloué à la défense et à l’aéronautique. Des valeurs telles que Thales, Lockheed Martin, Dassault ou Latecoere devraient logiquement grimper. Le moment d’acquérir des actions dans ces groupes semble donc particulièrement opportun.

Renforcement de la cybersécurité

Dérivée du secteur de la défense, la cybersécurité devrait également connaître un développement significatif. Wall Street a d’ores et déjà parié sur une recrudescence des cyberattaques venant des deux côtés engagés dans la guerre. Néanmoins, la Russie, ainsi que son potentiel allié chinois sont sensiblement en avance sur le sujet, bien que les États-Unis investissent pour rattraper leur retard. Alors que des mesures récentes prévoyaient une progression du marché avant même le début du conflit, investir dans des ETF spécialisés paraît judicieux. 3 d’entre eux ont particulièrement retenus notre attention : Global X Cybersecurity (BUG), WisdomTree Cybersecurity (WCBR) et ProShares Ultra (UVXY).

🔗 Pour en savoir plus — retrouvez notre article complet sur la cybersécurité, un marché d’avenir plein de promesses

Les crypto-monnaies, une bonne alternative ?

Au début du conflit, de nombreux épargnants russes et ukrainiens n’avaient pas manqué de se ruer sur les crypto-monnaies pour compenser la chute de leur devise respective et contourner les sanctions économiques. Cependant, quelques heures avant l’écriture de ces lignes, le ministre français de l’économie Bruno Lemaire annonçait que ces sanctions devraient à l’avenir s’étendre aux cryptomonnaies. Visiblement, la démarche est en outre soutenue par les autres pays du G7 et l’Union Européenne.

Néanmoins, les cryptomonnaies étant décorrélées des institutions bancaires traditionnelles, il parait difficile d’appliquer ces directives de manière systémique. Envisager l’une ou l’autre des cryptomonnaies comme alternative aux sanctions devra donc se faire au cas par cas, en suivant de près l’évolution des sanctions économiques. Prudence !

Des valeurs américaines comme nouveaux refuges

Les États-Unis, et par extension des pays comme le Canada ou le Mexique vont pouvoir profiter de leur distance géographique avec le conflit russo-ukrainien. C’est d’ailleurs l’une des raisons qui expliquent la bonne dynamique que connait le NASDAQ depuis le début de la guerre. Si vous craignez que l’instabilité du marché européen s’étendent perdure, investir Outre-Atlantique pourrait être une bonne solution de repli. Là aussi, acheter des actifs dans l’armement ou la cybersécurité, bien qu’issus de l’Amérique, semble être le choix le plus prudent.

La guerre est toujours synonyme d’instabilité

Voici une rapide des secteurs risquant d’être impacté par les répercutions de ce conflit ainsi que les secteurs pouvant en bénéficier. Face à ce conflit et la position relativement neutre des États-Unis, il y a fort à parier que les investisseurs se tourneront vers les valeurs américaines au détriment des valeurs européennes. Dans le contexte actuel, jouer sur les marchés financiers devient un exercice encore plus risqué, qu’il faudra pratiquer avec précaution.

Comme souvent, chercher la sécurité de son portefeuille, c’est sortir des marchés financiers pour se diriger vers les valeurs refuges, telles que l’Or (ou selon certains, le Bitcoin). Historiquement, le métal jaune s’est montré très résilient en temps de guerre ou de crise, et permet tout du moins de faire souffler son épargne avant de repartir de plus belle.

Les secteurs prometteurs

  • L’industrie de l’armement ;
  • L’aéronautique et la cyber-sécurité ;
  • Les valeurs américaines.

Les secteurs à risques

  • L’agro-alimentaire ;
  • L’industrie du gaz ;
  • Les valeurs européenes et russes

En conclusion, rappelons que les conflits entraînent invariablement une volatilité des marchés. Quel que soit le secteur ou la zone géographique que vous ciblez, la vérité d’un jour n’est pas nécessairement celle du lendemain. Une des erreurs classiques des investisseurs débutants est de manquer de diversité, et c’est encore plus vrai en temps de guerre où les changements de dynamique sont d’autant plus fréquents. Restez informés et ouverts aux possibilités d’un changement rapide !

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Baptiste Vinçon

Baptiste Vinçon

Rédacteur indépendant depuis plus de 4 ans. Passionné par la vulgarisation de l'industrie, de la finance et des nouvelles technologies, Baptiste démocratise les sujets liés aux matières premières, aux marchés financiers et au développement durable.

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